La Mue
La Mue
est une forme libre de la représentation de la douleur de
l'être. Une tentative d'imager la douleur du corps quand l'individu
est devenu un terrain miné. Allégoriquement, je me suis inspiré
de la peau du serpent qui mue, chaque écaille, l'une après l'autre,
se détache de la peau, s'arrache. Ce qui en résulte est une bête
que l'on pourrait dire écorchée vive.
Alors que
j’amorçais un retour à ma pratique, une série de dessins
constitués de barbelés et d'objets contondants se sont imposés à
moi. Ces objets m'ont posé la question de la douleur et de sa
représentation, de son incrustation insidieuse dans un corps d'où
la nécessité de trouver un réceptacle pour la recevoir. La peau de
serpent pouvait servir mon propos.
Par la
suite, la question de comment se libérer de cette douleur inscrite
en nous s’est posée à moi. Comment guérir individuellement par
les douleurs insidieuses?
La
Mue appelle à certaines transformations tout en
restant celui que l’on est. Quand l'épiderme et l'intérieur se
rejoignent, que le feu est pris en dedans, nous devons laisser tomber
les masques. Voilà l'état d'esprit dans lequel ce projet a pris
forme.
Un journal
de bord fait de petits dessins automatiques accompagne ce projet, ma
consigne en était l'exécution en moins de trois minutes. Ce journal
m'obligeait d'une certaine façon à retourner tous les jours dans
l'atelier pour y laisser au moins une trace de mon passage. Ces
dessins sont aussi un reflet de mon état intérieur lorsque
j'entrais dans mon atelier.
Une bande
son originale accompagne ce projet. Cette dernière donne une autre
matérialité, elle ajoute du vivant, un souffle à la souffrance.
Cette bande-son a été réalisée par l'altiste Jean René. Cela a
été fait après un échange verbal sans contact visuel avec
l’oeuvre. Après un descriptif du travail visuel, sans l'avoir vu,
celui-ci s'est mis au travail. Le résultat est une transcription de
ses propres émotions sur le thème de la mue, du déchirement et de
la douleur. Je crois que cette façon de faire a laissé libre cours
aux émotions de Jean sans qu'il soit trop influencé par l'œuvre.
Il a travaillé à partir de son senti intérieur ce qui collait à
la réalité de mon projet.
Enfin, une
série quatre dessins/essais (un essai par grand dessin) issue de ce
projet fait maintenant partie de la collection Loto-Québec. La série
a été acquise suite à l'encan bénéfice du Musée des
Laurentides.
Ce projet a
été exposé dans mon espace personnel à l'été 2012 sur la rue
Jeanne-Mance à Montréal, QC, Canada.